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Livre blanc de la défense : surmonter la crise et la contrainte budgétaire

Après la publication du Livre blanc de la défense, le réel enjeu de la pensée stratégique française sera tranché en octobre 2013.

Publié le 06 mai 2013 à 17h04, modifié le 06 mai 2013 à 17h04 Temps de Lecture 3 min.

La publication du Livre blanc de la défense est l'opportunité pour chacune des chapelles politiques, industrielles et militaires que compte le landerneau français de faire entendre sa voix. La présentation de la dernière mouture de celui-ci n'a pas dérogé à la règle. Alors que ses conclusions sont en train d'être digérées par le milieu de la défense, il a suscité son immanquable lot de réactions hostiles dans la classe politique et doit faire l'objet d'une intervention publique du chef de l'Etat fin mai.

Reste qu'il faudra vraisemblablement attendre le débat sur la loi de programmation budgétaire de cet automne pour juger de l'impact réel du Livre blanc sur les armées francaises. Il ne fait guère de doute d'ailleurs que les passes d'armes entre Bercy, la défense et les états-majors des trois armées se poursuivront dans l'intervalle.

Au-delà cependant des querelles intestines et des critiques dont le livre blanc fait l'objet, il est quelques éléments de contexte qu'il peut être bon de rappeler. Il suffit de jeter un oeil au-delà de nos frontières pour s'apercevoir que le Livre blanc et le processus qui préside à son élaboratio, ne laissent pas d'être admirés ailleurs. Par le souci stratégique qu'il incarne et la consultation nationale qui le précède, il représente une certaine spécificité francaise.

Rares en effet sont les pays européens dotés d'une analyse stratégique qui débouche concrètement sur une politique de défense nationale. Certains Etats européens s'efforcent bien de mettre en rapport objectifs stratégiques et définition de leurs capacités militaires, mais avec un résultat inégal. Le Livre blanc britannique de 2010, par exemple, isole deux menaces principales pour la sécurité du Royaume-Uni : le terrorisme d'une part, la cybersécurité de l'autre. Mais pour parer à ces menaces, il prescrit en retour d'acquérir davantage de porte-avions. Un grand écart qui n'a pas manqué de susciter critiques et commentaires acerbes outre-manche. Le lien entre la stratégie formulée en amont et les arbitrages budgétaires ultérieurs s'avére donc parfois des plus ténus, y compris parmi les puissances militaires que compte le continent.

Certains Etats européens ne nourrissent d'ailleurs aucune ambition particulière en la matière, puisque cette lacune est toujours déjà comblée par l'Alliance atlantique. Les processus de planification militaire de la Roumanie, de la Bulgarie, de la Pologne et des pays Baltes sont ainsi expressément calqués sur ceux de l'OTAN.

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Inversement, il est des pays qui mettent en œuvre une riche réflexion stratégique, sans pour autant qu'elle ne se traduise de façon effective sur le plan opérationnel. La documentation stratégique des Pays-Bas par exemple se livre à une lecture très fine des mutations de l'environnement international. Mais ces considérations conceptuelles, dépourvues qu'elles sont de pendant opérationnel, ne débouchent sur aucune recommandation pratique. Difficile dès lors de lier les arbitrages budgétaires en aval aux considérations stratégiques formulées en amont. La récente décision néerlandaise de se passer entièrement de blindés lourds, comme celle du Danemark de se passer de sous-marins, en sont quelques exemples frappants.

Par opposition, la France se prévaut de faire découler sa politique de défense d'une analyse stratégique préalable, fouillée, qui s'incarne dans le Livre blanc. Celui-ci formule d'abord les grands objectifs de la politique extérieure du pays, puis les moyens par lesquels il conçoit d'y parvenir, de telle manière à ce que l'État puisse les mettre en œuvre dans la limite des fonds qu'il est prêt à allouer à sa défense. Articuler des moyens à des fins : c'est la définition d'une stratégie.

Pour le meilleur ou pour le pire, il subsiste donc une certaine tradition stratégique francaise, dans laquelle le nouveau Livre blanc de défense s'inscrit de plain-pied. Et sa dernière mouture d'insister sur "l'autonomie stratégique" de la France, avatar contemporain de la souverainté nationale et de "l'indépendance militaire" de l'ère gaullienne.

Reste à voir ce qu'il adviendra de ce souci stratégique en temps de crise. L'on saura dans quelques mois si ces derniers oripeaux de l'héritage gaullien résistent à la tempête économique ou s'ils se noient dans les impossibles équations budgétaires qui s'annoncent.

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