Bienvenue dans la " Ch'tilicon Valley "
D'EuraTechnologies à la Plaine images, Lille s'exporte plutôt bien.
Par Audrey EmeryTemps de lecture : 3 min
Il y a quelque chose de rafraîchissant à EuraTechnologies. Rien à voir avec le climat nordique, non. Il s'agit plutôt de l'ambiance, d'un état d'esprit. Ici, la mondialisation ne fait pas peur. Elle est même dans l'ADN de cet accélérateur d'entreprises créé en 2009, aujourd'hui l'un des plus aboutis de France. "Dès qu'une entreprise arrive ici, on évoque le développement international. Car nous pensons que, pour monter en gamme, il faut aller plus loin que le marché français", explique Jérôme Fauquembergue, directeur opérationnel d'EuraTechnologies.
Depuis quelques années, le parc a ainsi des bureaux relais dans la Silicon Valley, à Dubai, Shanghai, Belo Horizonte. D'autres sont en cours de création à New York, Berlin et Londres. "J'emmène cinq ou six entreprises sur place afin qu'elles testent leur marché, dans le cadre de programmes cofinancés par la région. Pour le moment, cinq entreprises ont créé une filiale à San Francisco et deux en Chine", poursuit Jérôme Fauquembergue. En septembre, le parc est allé encore plus loin, avec le lancement du premier accélérateur franco-chinois, soutenu par la région : EuraTech in China.
En 2015, le géant asiatique sera l'un des trois premiers marchés mondiaux du numérique. "Mais l'attaquer en direct est trop dur et trop incertain", souligne Jérôme Fauquembergue. D'où l'idée d'un accompagnement sur dix-huit mois, avec du coaching, la mise à disposition de bureaux à Shanghai, d'un kit d'installation...
Stanford.
Ce modèle, EuraTechnologies le pratique déjà en partie dans le cadre de son partenariat avec l'université californienne Stanford, lancé il y a quatre ans. Unique en Europe, il a permis à 120 patrons de suivre une formation sur place, au terme de laquelle un certificat leur est délivré... ou pas. "Quelques-uns ont dû arrêter leur activité, mais la plupart ont vraiment monétisé leurs innovations et réalisé des levées de fonds significatives", observe Jérôme Fauquembergue. C'est le cas de Giroptic, qui a mis au point une caméra panoramique. Il y a trois ans, son patron de 34 ans, Richard Ollier, s'envolait pour Stanford : "Mes idées sur l'entreprise ont été complètement chamboulées, raconte-t-il. Là-bas, on vous pousse à être ambitieux, à penser "big'' . " En mai, l'entrepreneur a ainsi lancé une campagne à l'américaine sur Kickstarter, le site de référence du financement participatif, qui lui a rapporté 1,4 million d'euros. C'est la plus grosse levée de fonds d'une entreprise française sur cette plate-forme. Grâce à elle, Giroptic attaquera le marché grand public en janvier.
EuraTechnologies a changé aussi le regard des entreprises étrangères sur la France, avec l'implantation d'IBM et de Tata à Lille. Mais le parc veut aussi attirer des sociétés plus modestes pour créer de l'emploi. "Beaucoup fantasment sur le fameux 35/45/75 : 35 heures ; 45 jours de congés ; 75 % de taxes. Depuis décembre 2013, nous leur proposons un accompagnement sur quelques mois, pour qu'elles viennent tester sur place", explique le directeur général d'EuraTechnologies, Raouti Chehih. Du Liban à l'Espagne, une poignée d'entreprises est déjà intéressée.
A Tourcoing, la Plaine images, cluster dédié à la création numérique, commence aussi à plancher sur l'international, en suivant les pas de son fleuron, Ankama. Ce studio d'animation créé en 2001 est la deuxième entreprise de jeux vidéo en France.
Netflix.
Déjà présent à Montréal, Singapour et São Paulo, il vient de signer un accord avec Netflix pour diffuser sa série "Wakfu" partout où la plate-forme américaine est présente. "Nous préparons aussi un lancement en Chine pour novembre", annonce son patron, Olivier Comte.
Mais gare au péché d'orgueil ! Si le marketing territorial parle volontiers de "Ch'tilicon Valley", le berceau de Google est loin d'être considéré comme un modèle. "Il n'y a qu'une seule Silicon Valley et ceux qui ont voulu la copier se sont plantés,s'agace Raouti Chehih. Nous sommes en train d'amorcer un virage économique et de recréer une nouvelle vague entrepreneuriale, quand la Californie l'a fait il y a cinquante ans !" Une telle lucidité ne peut être que de bon augure pour l'économie lilloise.
EuraTechnologies
140 entreprises
2 500 salariés
La Plaine images
80 entreprises
1 200 salariés
Unique en Europe
A partir du second semestre 2015 au plus tard, le pôle de compétitivité des industries du commerce aura enfin son bras armé sur le site d'EuraTechnologies : le Shopping Innovation Lab. Ce projet de 4 millions d'euros, s'inscrit dans le cadre du programme d'investissement d'avenir et permettra aux entreprises de tester leurs innovations, avec un espace de simulation en 3D et un laboratoire d'usage.