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Chroniques du totalitarisme 3 - Le prélude pervers sur le corps

Dernière mise à jour : 13 déc. 2021

Ariane Bilheran, normalienne (Ulm), philosophe, psychologue clinicienne, docteur en psychopathologie, spécialisée dans l’étude de la manipulation, de la paranoïa, de la perversion, du harcèlement et du totalitarisme.


Paru dans l’Antipresse n°296.

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« L’objet propre de la biopolitique, c’est la « vie nue » (zôè), qui désignait chez les Grecs « le simple fait de vivre », commun à tous les êtres vivants (animaux, hommes ou dieux), distincte de la « vie qualifiée » (bios) qui indiquait « la forme ou la façon de vivre propre à un individu ou un groupe ».

Giorgio Agamben[1].



C’est bien cette prétention à régir cette vie nue, qui est clairement apparue depuis le premier trimestre 2020 : les restrictions des mouvements jusqu’à l’immobilisation (confinements, isolement), la distance imposée entre les corps (la « distanciation sociale »), la réduction des visages à la pulsion scopique (le seul regard), la respiration contrainte etc. Désormais, l’injection obligatoire est l’initiation incontournable du nouveau « contrat social » tracé au rythme de nuits frénétiques à l’Assemblée Nationale en France. La vie sociale, économique et politique, l’accès aux soins, à l’instruction et aux loisirs, en d’autres termes, la « civilisation », ne seront bientôt plus autorisés qu’aux seuls initiés : ceux qui auront reçu le marquage corporel exigé par le pouvoir.


Pour instaurer la logique totalitaire, Hannah Arendt avait noté l’utilisation de méthodes des sociétés secrètes : quiconque n’est pas inclus par des rituels, est exclu ; les opinions divergentes sont supprimées ; la loyauté exigée est totale. Les rituels obsessionnels compulsifs ont pénétré l’espace social depuis des mois, et condamné à la répétition traumatique perpétuelle, par le rappel de la soumission : se laver les mains avant de rentrer chez les marchands du temple, par exemple. Le corps est réduit à une muselière avec une laisse : sont actuellement à l’étude un bracelet électronique qui indiquera à combien de distance vous avez le droit de bouger, et « des mesures plus intrusives » encore, notamment le collier pour chien qui bipe ![2]


Interdit aux non-vaccinés et aux chiens, peut-on lire à certains endroits, dits « culturels ».


Il s’agit d’une emprise violente sur l’individu, annihilant le corps symbolique. Le virus informatique est le modèle dominant. Un individu « infecté » est considéré comme un ordinateur « à nettoyer ». « Le Grand Reset » est une opération économique à grande échelle qui reprend une terminologie informatique.


Ce serait une erreur de réduire le phénomène totalitaire actuel au seul champ sanitaire. Car la pseudo-logique paranoïaque est un rapport global au monde fondé sur des croyances idéologiques, organisées autour de la persécution de l’être humain. Avec le discours d’Emmanuel Macron en France, du 12 juillet 2021, il est acté que le corps du citoyen est la propriété du Souverain. Le Souverain n’est plus le peuple, comme dans la très révolue démocratie rousseauiste, mais bel et bien une caste dirigeante fanatique du contrôle et du transhumanisme, qui entend non plus seulement contraindre les corps, mais les faire plier. « Mon corps m’appartient » n’est plus qu’un vague souvenir de revendications féministes d’une époque ancestrale. Le corps appartient au Suzerain, et c’est cela qui, entre autres, a fait traumatisme dans ce discours. « Liberté » crient les manifestants. Les corps s’insurgent dans la rue en réponse à l’ambition totalitaire de les contraindre et asservir. Et si l’on refuse ce marquage ? Punition, chantage, bannissement, ostracisme et persécution. « O si, o si », comme dit le dicton en espagnol, une seule réponse possible : le peuple doit obtempérer.


La déshumanisation totalitaire suppose la désacralisation du corps humain. L’instrumentalisation perverse précède l’anéantissement des corps, car la perversion est l’adjudant-chef de la psychose paranoïaque dans son projet mortifère de destruction totale. Elle lui déroule le tapis rouge pour la création de « l’homme nouveau », en procédant à l’éradication de « l’homme ancien ». Le délire paranoïaque perçoit le corps social non plus comme un ensemble d’individus, mais comme une masse faisant littéralement corps, et qui serait malade. Pour sauver le tout, il faudrait donc sacrifier des parties. Mais la persécution ressentie par le pouvoir ne cessera pas : elle s’étendra de façon arbitraire à la totalité des citoyens, vécus comme diffus dans ce grand corps. Il y a là une hypocondrie délirante d’interprétation endogène, selon l’équation :

1° Je ressens un malaise dans mon corps.

2° = > Mon corps me persécute.

3° = > Je dois persécuter mon corps pour que ce malaise cesse.

Telle est la méthode paranoïaque appliquée aux masses.


Jusqu’ici, les corps étaient implicitement réduits à leur capacité de production. Ce qui était présent mais caché est devenu visible : dans les « motifs impérieux » à invoquer cette année, il y avait le travail.


Le travail a été considéré plus impérieux que la naissance d’un petit-fils ou d’une petite-fille, par exemple. Vous pouviez venir de l’étranger en France pour y travailler, et non pour aider un proche en difficulté, ni accueillir une naissance dans votre famille. Si le corps ne produit plus suffisamment, ou s’il est « non-essentiel » : on harcèle et on jette.


Surveillé et dressé, le corps biologique devient peu à peu instrument du politique : chaque individu est absorbé comme « membre » du corps social, dont seront contrôlés les faits et gestes. Le corps est un contenant inerte susceptible d’être touché par un virus s’il ne porte pas un masque, avec une gestion statistique de corps infectés ou non infectés : l’individu est réduit à un « cas », et le corps, à un état mécanique, et interchangeable. L’inverse de la médecine ! Si la médecine est un art, c’est parce que précisément dans le soin, il s’agit pour le médecin de savoir, à partir de son expérience, de ses connaissances, de son talent thérapeutique, quels traitements donner à ce patient en particulier, avec son histoire, à ce moment-là de son existence, et selon ses prédispositions, son anamnèse, ses habitudes, son tempérament et son terrain. Dans le phénomène totalitaire, c’est la même réponse pour tous : tous les corps se valent. Au diable les dangers de chocs anaphylactiques post-vaccinaux[3], le rituel initiatique d’intégration au nouveau corps social doit fatalement comporter un danger de mort. Il faut une véritable initiation, une qui soit signée dans le sang, sinon cela ne compte pas.


Qu’il s’agisse d’exhiber le corps nu à tout-va, ou d’enfermer les corps dans des carcans insoutenables, c’est bien le statut même du corps dans sa visibilité sociale qui est en jeu. Le corps devient la marque de l’idéologie : en jupes pour les garçons, entièrement dissimulé pour des intégrismes religieux, en hypersexualisé pour les petites filles mannequins, souillé, violé et fétichisé dans l’esthétique moderne de la « nouvelle normalité » (cf. le Christ en croix baignant dans le sang et l’urine de l’artiste[4] - à noter, les Corses n’ont guère apprécié l’exposition[5] -, « le Vagin de la Reine » à Versailles[6], le plug anal de la place Vendôme[7]).


Des médias sont allés jusqu’à indiquer qu’il serait conseillé de porter un masque dans les relations sexuelles intimes, au fond de la chambre à coucher. Pourquoi pas les fouets et les menottes, tant qu’on y est, et les caméras pour que le pouvoir totalitaire surveille si les ébats ont lieu selon les codes en vigueur ? Je rappelle que le ministère de la Santé français au travers du site onsexprime.fr, a, depuis des années, sélectionné ses sept positions sexuelles favorites à transmettre aux enfants (site sans limite d’âge, conseillé à l’école aux enfants dès 11 ans). Sept, et pas davantage. Avec les « droits sexuels », il ne s’agit pas de favoriser une sexualité épanouie, mais de traumatiser dès le plus jeune âge et de contrôler la façon de jouir des futurs adultes : pourvu que ce soit sans amour ! Les « droits sexuels » prévoient d’ailleurs l’enseignement de la prostitution (selon l’OMS, pour les 15 ans et plus, l’enseignement des « relations sexuelles de nature transactionnelle (prostitution, mais aussi sexe en échange de petits cadeaux, repas, sorties, petites sommes d’argent), la pornographie) »[8] : « mon corps m’appartient », signifie désormais l’apologie de la prostitution : j’ai le droit de marchander mon corps.


Quelle bien curieuse liberté : celle de se transgresser et d’être transgressé.


Résumons la « nouvelle normalité » : le sexe sans l’amour, l’art sans la beauté, la médecine sans le soin, la politique sans le citoyen.


Certains grands industriels et financiers très présents dans l’idéologie sanitaire depuis 2020 le sont aussi dans les « droits sexuels et reproductifs » de l’OMS. Les « Standards pour l’éducation sexuelle en Europe », un torchon scientiste fondé sur des lobbies pro-pédophiles, promeut la sexualité comme une « matière » à enseigner dès « 0 an », avec l’adulte comme « partenaire », et des « compétences » à valider, sans aucune considération pour le développement psychique de l’enfant, mais aussi les « bébés sur-mesure » et autres joyeusetés. Parler de cette perversion institutionnelle expose à des représailles inimaginables (calomnies, insultes, menaces de mort etc.). Dans la population, le tabou et le déni règnent : nul n’a envie de savoir la réelle nature de ce projet transgresseur des enfants.


Ne nous y trompons pas.

La façade sanitaire a permis l’avancée d’autres facettes du totalitarisme mondial.


Dans le totalitarisme, le corps est marchandé, en pièces détachées ou en totalités. Votre consentement est présumé implicite, par exemple, pour le don d’organes. C’est un peu pareil pour la politique « vaccinale » de l’OMS, qui brandit désormais le « consentement implicite »[9]. Si vous n’avez pas manifesté un refus, vous êtes supposé consentant. Cela m’évoque un article dans la revue Sexology, dirigée notamment par John Money (pionnier du changement de sexe par la chirurgie chez les jeunes enfants, au sein de l’équipe Kinsey). Beryl H. Levy, professeur de droit y édite un article « qu’est-ce que le viol » ? où il s’agit d’étudier « l’absence de consentement » : « Il doit être démontré que la femme s’est battue comme une tigresse. Il doit être prouvé qu’elle a résisté de toute sa force et avec tous les moyens à sa disposition : poings, pieds, ongles, dents, cris etc. Certains experts sont d’avis qu’il est impossible pour un homme de violer une femme en bonne santé et de force moyenne… »[10].


Avec les pervers, c’est toujours sans violence n’est-ce pas : votre consentement est toujours présumé !


Sans rentrer dans le détail des évolutions en cours, c’est bien d’un monde à la Huxley dont il est question : bébés éprouvettes, utérus artificiels, suppression de la filiation et de la famille, manipulations génétiques, créations de chimères hommes/animaux, euthanasie, etc. Le tout agrémenté par le traditionnel abus des riches contre les pauvres, doublé de la misogynie d’un patriarcat des plus ancestraux : des femelles pauvres, aux corps exploités, pour produire des bébés aux mâles riches consommateurs[11].


Avec le projet totalitaire, le corps est contraint, immobilisé tout autant qu’exposé, objet d’expérimentation, de transgression, en particulier sexuelle ; le corps est réduit à sa capacité de production et à sa valeur marchande, en entier ou en pièces détachées. La violence perverse vient marquer les corps, les exhiber dans leur souffrance, les mécaniser, les transgresser, les égaliser, les traiter de manière interchangeable. En désanimant le corps (en lui supprimant son âme), elle fait le lit de l’ambition paranoïaque : l’annihilation pure et simple des corps, et partant, des esprits.



--------------------------------- Notes : [1] Homo Sacer, le pouvoir souverain et la vie nue, Seuil, 1997 ; Ce qui reste d’Auschwitz, Bibliothèque Rivages, 1999. [2] « Les trois sénateurs reprennent aussi l’idée de l’entreprise suédoise Essity, qui avait voulu équiper ses employés d’un boîtier connecté pour faire respecter les distanciations, en janvier 2021. Porté autour du cou, il devait émettre un son de 85 décibels, soit l’équivalent d’un réveille-matin, si deux employés étaient trop proches. » https://www.marianne.net/societe/big-brother/malades-sous-bracelets-electroniques-le-senat-imagine-des-mesures-en-cas-de-super-covid [3] La nuit du 25 au 26 juillet 2021, un amendement a été proposé pour exempter du pass sanitaire les personnes qui risquent un choc anaphylactique. L’amendement a été rejeté. [4] Piss Christ d’Andres Serrano. [5] https://www.lefigaro.fr/arts-expositions/2014/08/28/03015-20140828ARTFIG00064--piss-christ-a-ajaccio-les-corses-demandent-sa-deportation.php [6] Anish Kapoor. [7] Mc Carthy. [8] https://www.onsexprime.fr/extension/onsexprime/tools/app-position/index.html, cf. mon livre L’imposture des droits sexuels, 4ème réédition en 2020. - Standards pour l’éducation sexuelle en Europe, p. 50. [9] http://www.henrydarthenay.com/2021/07/l-oms-presente-le-concept-de-consentement-implicite-pour-la-vaccination.html [10] What is Rape?, article tiré du magazine Sexology, de juin 1961, p. 744-748. [11] https://www.lalibre.be/debats/opinions/2018/09/19/un-salon-pour-la-gestation-pour-autrui-gpa-commerciale-a-bruxelles-ce-week-end-non-INZLEJLN35CPHF4O3V265RITXI/ : « au salon "Men having babies", des firmes proposent sur catalogue un éventail de mères porteuses potentielles qui acceptent - moyennant salaire - de porter un enfant. Le prix global d’un enfant - réduit à une marchandise- se situe entre 95 000 et 160 000 dollars. »


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