Un sentiment de confusion et d’abattement était perceptible à Bruxelles, après l’annonce du retrait de Boris Johnson de la course au 10, Downing Street, jeudi 30 juin, et les atermoiements des candidats conservateurs à la succession de David Cameron pour lancer la procédure de divorce. « Tout ça pour ça, hallucinant ! », s’emportent deux fonctionnaires de la représentation britannique en grande conversation devant la British House, « l’ambassade » auprès de cette Union que le royaume va quitter.
Confusion, abattement, gâchis aussi. Dans les institutions tellement décriées par le camp du Brexit, on considère que le « Brussels bashing » (« dénigrement de Bruxelles ») incessant alimenté par M. Johnson, notamment au travers de ses chroniques dans le Daily Telegraph, est l’une des principales causes du vote « Leave ». « Je suis en colère, d’autant plus que, dans le camp d’en face, M. Cameron n’était pas crédible dans sa défense de l’Europe, et que les travaillistes semblaient ne pas avoir de ligne », confie un fonctionnaire du service d’action extérieure, un peu inquiet pour son avenir.
« Nous avons fait plus que le maximum »
Un propos relayé au plus haut niveau, puisque, lors du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement, mardi 28 juin, le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, a remercié M. Cameron d’avoir défendu l’Europe durant sa campagne, mais regretté qu’il n’ait pas parlé de cette façon de Bruxelles « durant les quinze années précédentes ».
L’amertume est aussi alimentée par le fait que les concessions faites à M. Cameron n’ont servi à rien. Les fonctionnaires bruxellois avaient œuvré durant six mois pour présenter, en février, un « paquet » de concessions à Londres et permettre au camp du « Remain » de mener plus facilement sa campagne, comme il l’avait réclamé.
Les Vingt-Sept avaient accepté de donner au Royaume-Uni un droit de regard sur les décisions de la zone euro et de limiter les prestations sociales pour les travailleurs non britanniques. « Nous avons fait plus que le maximum, dans le respect des traités », confie un officiel européen, insistant sur le fait que modifier ceux-ci aurait de toute façon été impossible, ce que personne, et même M. Cameron, n’ignorait.
« Cameron aurait dû d’abord lancer son référendum, puis commencer la renégociation avec Bruxelles, analyse un officiel. De cette manière, les citoyens britanniques auraient compris que négocier la fin de la libre circulation des travailleurs tout en conservant un accès au marché intérieur était impossible. Ils auraient été mieux informés sur le sens de leur vote. »
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