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La maison de Pablo Neruda a été saccagée

Le Monde

Publié le 26 septembre 1973 à 00h00, modifié le 26 septembre 1973 à 00h00

Temps de Lecture 2 min.

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Santiago-du-Chili. - La maison est accrochée aux flancs de la colline de San-Cristobal, qui domine Santiago. Il faut, pour y parvenir, grimper une rue en pente au bout de laquelle s'étale sur un mur une fresque aux dessins larges et colorés proclamant : " Neruda, la jeunesse te salue. "

C'est là qu'est veillé le corps du poète Mais, dès l'entrée, les larmes montent aux yeux. Cette merveilleuse maison bleue, étagée sur plusieurs niveaux au milieu de la verdure et des plantes sauvages, n'est plus qu'une ruine, des " visiteurs " y sont passés la semaine dernière.

Autodafé

Tout a été détruit. Plus une vitre aux fenêtres. Le téléphone a été arraché. Quelques meubles sens dessus dessous dans des pièces désolées. Dans un coin du jardin, un livre de poèmes espagnols à demi calciné au milieu des cendres de l'autodafé. Plus un seul vestige de la bibliothèque, ni de la collection de céramiques, ni des nombreuses peintures naïves qui faisaient l'admiration des privilégiés reçus chez le maître. Pour monter d'une pièce à l'autre, il faut se frayer un chemin parmi les décombres. Patauger dans la boue, car la maison a été à moitié inondée.

Dieu sait pourquoi et comment. Du bureau subsistent seules la grande table de travail éraflée et une horloge ancienne au cadran de porcelaine bleue défoncé. Un vieil exemplaire des Lettres françaises traîne dans un coin.

Le cercueil est dans une petite pièce triste, ouverte à tous les vents On écrase des éclats de verre pour s'approcher et contempler une dernière fois le visage cireux dont la mort semble avoir accentué l'indianité austère.

Des fleurs arrivent. Deux œillets blancs sur le cercueil et quelques bouquets humbles apportés par des mains anonymes.

La veuve, Matilde Urutia, a tenu à ce que Pablo soit veillé dans sa propre maison, même saccagée. Cette mort aurait exigé des funérailles nationales. En novembre dernier encore, tandis que Salvador Allende se faisait aux Nations unies l'avocat du tiers-monde, c'était le général Prats, autre disparu, qui, au titre de vice-président de la République, avait rendu hommage au prix Nobel " dont la gloire rejaillissait sur chaque citoyen ". Nous étions au stade national. Aujourd'hui, ce même stade sert de camp de concentration pour ceux des amis du poète qui ne sont pas cachés ou tués. Les militaires patrouillent aux alentours. Seuls ont pu venir quelques diplomates, quelques proches point trop " marqués ", quelques démocrates - chrétiens libéraux, comme Radomiro Tomic. L'ambassadeur de Suède a trouvé les mots justes pour saluer l'auteur du Chant général devant les cameramen de la télévision. L'ambassadeur de France, M. Pierre de Menthon, est venu avec ses deux conseillers. Une carte laissée par un étranger est d'un laconisme éloquent : " Nos duele Chile " (le Chili nous fait mal).

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