POLITIQUE - Ce dimanche, Emmanuel Macron a profité de sa première interview télévisuelle depuis son élection pour tenter de corriger son image de "président des riches" tout en justifiant ses choix budgétaires favorisant les plus aisés. "Je crois à la cordée, il y a des hommes et des femmes qui réussissent parce qu'ils ont des talents, je veux qu'on les célèbre [...] Si l'on commence à jeter des cailloux sur les premiers de cordée c'est toute la cordée qui dégringole", a plaidé le chef de l'Etat ce dimanche soir sur TF1 dans une tirade visiblement préparée.
Croquignolesque? Pour décoller une étiquette peu flatteuse de président des privilégiés et s'imposer comme "le président de tous les Français", quoi de mieux qu'une métaphore valorisant l'effort collectif. D'autant que l'expression est une référence indirecte au roman "Premier de cordée" de Roger Frison-Roche, paru en 1942 et adapté au cinéma, dans lequel un jeune alpiniste tente de surpasser sa peur du vertige. Comme une analogie d'une France au bord du précipice.
Problème: la comparaison s'est instantanément retournée contre son auteur, les détracteurs d'Emmanuel Macron voyant dans ces "premiers de cordée" une apologie des riches et de la réussite face à la "jalousie" des classes populaires.
"Le président des premiers de cordée"
"Il est plus que jamais le président des milliardaires et il l'assume en vantant ceux qui ont réussi - les fameux premiers de cordée - et en dédaignant ceux qui se battent pour garder leur boulot", a dénoncé ce lundi sur Radio Classique le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez. "S'il y a que le premier de cordée qui monte et que les autres se cassent la figure, c'est pas bon" non plus, a-t-il rappelé en critiquant "ce décalage avec la vraie vie qui pose problème avec M. Macron".
Un point de vue manifestement partagé par certains à la CFDT.
Du côté des responsables politiques, tout le monde ou presque s'est engouffré dans la brèche pour accabler le président de la République. "Il a trouvé lui-même l'expression... Il est le président des premiers de cordée : le président des riches, président des premiers de cordée", taclait dès dimanche sur France Info le député PS Boris Vallaud. Reprenant l'affiche du film "Premier de cordée" sorti pendant la Seconde guerre mondiale, le membre du bureau national du PS Gérard Filoche a épinglé les riches qui "s'empiffrent" et qui "laissent tomber ceux qu'ils ont exploités".
"Le président de la République peut dire tranquillement que les riches sont les premiers de cordée, comme si la richesse était synonyme de compétence et de mérite", s'est désolé sur Twitter le sénateur socialiste David Assouline.
Sans surprise, les cadres de la France insoumise se sont alignés pour caricaturer l'expression et son auteur. "Le premier de cordée de Macron, c'est du Frison Riche: le capital financiarisé accumule les profits, pas la solidarité", a ironisé le député LFI Eric Coquerel. "En résumé les riens fainéants, arrêtez d'être jaloux du premier de cordée!", a tweeté sa collègue Caroline Fiat en reprenant des mots polémiques employés par Emmanuel Macron par le passé.
Même à droite, où une partie des Républicains saluent pourtant la politique d'Emmanuel Macron, certains ont trouvé quelque chose à redire. Avec la hausse annoncée du prix du diesel et de la CSG, a prévenu le député Damien Abad, "la grande cordée est plutôt une corde au cou pour les classes populaires".
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