Val-d'Oise : les abus sexuels «consentis» sur une fillette de 11 ans font scandale

La justice considère que les faits commis par l’agresseur, âgé de 28 ans, sont des atteintes sexuelles, délit passible de la correctionnelle. L’avocate de la victime estime qu’il s’agit de viols. L’audience a été reportée.

 Pontoise, ce mardi 26 septembre 2017. Me Marc Goudarzian assiste l’homme de 28 ans qui a eu une relation sexuelle avec une fillette de 11 ans. Il devait comparaître au tribunal de Pontoise pour atteinte sexuelle.
Pontoise, ce mardi 26 septembre 2017. Me Marc Goudarzian assiste l’homme de 28 ans qui a eu une relation sexuelle avec une fillette de 11 ans. Il devait comparaître au tribunal de Pontoise pour atteinte sexuelle. LP/Marjorie Lenhardt

    Justine (*), 11 ans, pouvait elle être consentante au moment de son rapport sexuel avec un homme de 17 ans son aîné ? Est-il simplement possible de parler de consentement à cet âge-là ? C'est tout l'objet du débat juridique qui aurait pu s'ouvrir au tribunal de Pontoise, ce mardi. Mais l'affaire a été renvoyée au 13 février 2018 à la demande du parquet.

    Antoine (*), 28 ans, devait y être jugé pour atteinte sexuelle à l'encontre de la fillette. Cette infraction pénale signifie qu'une personne majeure a eu une relation sexuelle avec un mineur de moins de quinze ans (âge de la majorité sexuelle) sans exercer de violence, contrainte, menace ni surprise. Cette infraction est passible de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende.

    « Ce qui est aujourd'hui absolument scandaleux, c'est que l'on ait un débat juridique sur le consentement d'un enfant de 11 ans », s'insurge Me Carine Diebolt, avocate de la jeune fille, qui souhaiterait requalifier les faits en viol. Si le parquet a choisi de poursuivre en atteinte sexuelle, c'est parce que la jeune fille a suivi l'homme et cet acte sous-entendrait le consentement. En sortant du collège, le 24 avril dernier, Justine croise Antoine qu'elle connaissait au moins de vue et qui l'avait déjà abordé auparavant. Il lui propose de le suivre chez lui et la jeune fille s'exécute. Une fois dans l'ascenseur, Antoine lui demande une fellation. Elle accepte. Il tente de la pénétrer mais le gardien de l'immeuble passe par là et les interrompt. Une fois dans l'appartement des parents du jeune homme, il y aura un rapport intime. Ce n'est qu'en parlant à sa mère juste après que la jeune fille fait part de son état de choc.

    «Il y a eu contrainte morale de par la différence d'âge», estime l'avocat de l'enfant

    Pour Me Carine Diebolt, Justine s'est retrouvée tétanisée pendant les faits, elle ne s'est pas opposée car elle était dans un état de sidération. Un mécanisme qui selon l'avocate, est mésestimé par la justice. « Il y a eu contrainte morale de par la différence d'âge, c'est le pire acte de domination. Il y a eu surprise car il était sympathique au début puis agressif et déterminé une fois dans l'ascenseur, elle a craint pour elle car ils vivent dans la même cité et il y a eu menace car il lui a dit de n'en parler à personne », détaille-t-elle. L'avocate avance une préconisation du Haut conseil de l'égalité selon laquelle un seuil d'âge fixé à 13 ans pourrait-être adopté en-deça duquel il ne peut y avoir de consentement. Seuil déjà défini ailleurs, comme en Allemagne, Belgique, Autriche où il est fixé à 14 ans, à 16 ans en Angleterre et en Suisse et à 12 ans en Espagne et aux Etats-Unis.

    «Mon client ne connaissait pas l'âge» de la victime

    Pour l'avocat d'Antoine, Me Marc Goudarzian, « il faut distinguer la morale de l'infraction ». Son client affirme qu'il ne connaissait pas l'âge de la victime. « Mon client lui a demandé son âge, elle a haussé les épaules, il pensait qu'elle avait au moins plus de 15 ans », insiste-t-il. L'avocate de Justine, en revanche, affirme que la jeune fille avait sorti son carnet de correspondance pour lui montrer son âge. Pour Me Marc Goudarzian, le débat devra davantage tourner autour de la maturité physique et psychologique de la jeune fille. « Deux personnes ont eu un rapport sexuel, malheureusement sans connaissance de cause de la part de mon client ». En attendant le jugement, Antoine est laissé libre sous contrôle judiciaire avec interdiction de s'approcher de la jeune fille.

    (*) Les prénoms ont été modifiés.