"Pourquoi suis-je tellement affecté par cette affaire Fillon ? Au point qu'elle absorbe soudain, vous le voyez, l'essentiel de mon blog et de cet Antiroman naissant."

C'est la question que je posais il y a un mois, le 1 février, je la réédite ci-dessous. Depuis, je n'y ai pas encore répondu. J'ai relu ce texte. Rien à changer. Rien n'a changé, sauf en pire.

Depuis hier, où fut annoncée la convocation de Fillon le 15 mars, et sa décision de ne pas quitter les sables mouvants où il s'enfonce et nous enlise, j'en suis encore plus assommé. C'est très curieux, cette sensation d'étouffement accru, de poids accablant, dès lors de recherche de sens ; ou de distraction.

Peut-être n'est-ce pas curieux. Peut-être que la première fonction, physiologique, de la Justice est d'aérer le langage, de lui permettre de circuler. La justice comme source de justesse, et réciproquement. "Assassinat politique" dit-il ? Il vole des millions au peuple puis se décrète injustement accusé.

Peut-être que si le pouvoir judiciaire n'était pas aussi famélique et dépendant de l'argent que lui compte chichement le pouvoir exécutif, peut-être que, de manière générale, il faudrait moins de psy, d'anxiolytiques et d'antidépresseurs.

On peut rêver.

A condition de pouvoir dormir, un peu.

Merci au Canard de veiller sur nous.

Son coin-coin est une berceuse.

Et son coin-coin est un réveil.


Réédition du 1 février. < 2017/03/02/Pourquoi-suis-je-telleme... >

Pourquoi suis-je tellement affecté par cette affaire Fillon ? Au point qu'elle absorbe soudain, vous le voyez, l'essentiel de mon blog et de cet Antiroman naissant.

Je n'ai jamais souhaité qu'il devienne président de la République. Je n'aurais jamais voté pour lui. Je n'ai même jamais pensé qu'il fût particulièrement "honnête". Et j'avais découvert son profond cynisme lorsqu'il fit expulser à Kaboul trois ou quatre Afghans notoirement anti Talibans, les condamnant ainsi froidement.

Je trouvai aussi son programme ultra-libéral très inquiétant et susceptible de nous entraîner rapidement dans un scénario à la grecque, où les restrictions étranglent la croissance déjà trop faible donc augmentent la dette donc les intérêts de la dette donc le déficit public, ce qui finit par accroître les privatisations au profit des financiers prêteurs.

Fillon ne travaille pas pour l'Etat mais pour ses riches "amis". Lui-même comme député n'a rien fait et a gagné pendant ce temps-là des centaines de milliers d'euros avec son cabinet conseil qu'il a créé juste entre les présidentielles et les législatives. Comme sénateur non plus, il ne travaillait guère. Député fictif, sénateur fictif, assistants fictifs...

Peut-être que ce qui me révolte, c'est la complaisance de nombreux médias qui répètent sa défense visiblement mensongère sans la critiquer.

Ainsi, hier mercredi, ce propos de Fillon "C'est un coup d'Etat institutionnel". Les médiateux répètent cela sans résistance, sans réticence, sans en démonter l'absurdité et l'énormité. Et ils bouchent ainsi la place à de vrais journalistes. Ils diront que ce n'est pas leur rôle ? Qu'ils ne doivent pas prendre parti ?

Sa femme n'a rien fait, dit-il ; ils ont seulement détourné ensemble de l'argent public, et avec deux de leurs enfants, des centaines de milliers d'euros. A moins qu'elle n'ait pas su qu'elle avait des contrats de travail fictif, des bulletins de paie pour rien, et qu'elle n'ait pas vu les centaines de milliers d'euros qui entraient sur le compte ?

Bon, OK, ça, je le sais à cause des journalistes qui font leur boulot.

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Mais revenons à la question principale de ce billet, c'est le cas de le dire : pourquoi suis-je tellement affecté par cette affaire Fillon ?

Pourquoi sommes-nous d'ailleurs si nombreux à l'être ? Nicolas Demorand qui animait ce mercredi soir un "Téléphone sonne" sur cette affaire disait n'avoir jamais reçu autant de coups de fil et de tweets depuis qu'il produit cette émission. Une avalanche.

Est-ce parce que derrière la monstrueuse bête marine ne se réjouit que davantage ?

Je ne sais pas. Je n'y comprends rien de ce que j'éprouve. Je ne pense pas du tout "tous pourris". Je sais qu'il y a des élus plutôt honnêtes voire très honnêtes autant que possible, et que le métier de politicien est très compliqué puisqu'il faut défendre à la fois les intérêts de la chèvre et du chou.

Je ne sais pas. Peut-être est-ce à cause de la férocité du pouvoir qui apparaît ainsi, encore, et davantage au grand'jour. Pendant que la majorité lutte et travaille, quelques personnages (Sarkozy court encore, entre ou devant les juges) sont d'une arrogance extravagante. Les lois ne les concernent pas. Elles n'existent même pas et ne leur servent qu'à régler le ballet des apparences.

Peut-être est-ce à cause de l'angoisse collective que suscite cette oligarchie qui a tant de pouvoir et en veut encore plus, qui se met à la place des dieux, pour pouvoir nous dominer, nous posséder, nous briser en morceaux serviles. Des dieux sans bonté, sans bienfaits, sans bienveillance.

Rappelons-nous une fois de plus ce que dit le banquier Goldman Sachs, l'un des amis d'amis de Fillon, sinon dans les faits du moins dans la proximité idéologique : "Je suis Dieu. Je suis le Maître du Monde".

Peut-être avons-nous l'impression diffuse que Fillon se prend pour l'un des maîtres du monde ? Si lui aussi était "acquitté", comme Christine Lagarde, comme Eric Woerth, etc. quelle nouvelle catastrophe morale et sociale cela serait-il ? Certes, enfin, espérons, il se retirera avant de se faire écraser, espérons, à la présidentielle. Mais ce n'est pas pour autant qu'il devra rembourser les sommes indûment perçues ni même qu'il sera condamné à quoi que ce soit.

Peut-être est-ce cela qui nous travaille, la hantise de l'arbitraire le plus pur.

Pourquoi ?

Attendons l'émission de ce jeudi soir, l'interview anglaise, en 2007, de Pénélope Fillon qui passera ce soir dans Envoyé Spécial sur France 2, pour y voir plus clair dans cette affaire mais surtout pour y voir plus clair en nous et ces émotions si particulières qu'elle suscite.

"A propos de son mari : "Je n'ai jamais été son assistante, ou quoi que ce soit de ce genre-là", affirmait Penelope Fillon en mai 2007 > clic > © http://www.francetvinfo.fr/politiqu...

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